Hongrie - l'éléction des MPs

Introduction

Le 20 janvier 2012, le ministre des Affaires étrangères de Hongrie a demandé à la Commission européenne pour la démocratie par le droit (« la Commission de Venise ») du Conseil de l’Europe un avis sur divers textes législatifs récemment révisés, notamment la Loi CCIII sur les élections des membres du Parlement de Hongrie (dont la traduction officielle anglaise a été reçue par le canal diplomatique le 7 mars 2012 et classée sous la référence CDL-REF(2012)003. À la suite de cette demande, la Commission de Venise et le Bureau de l’OSCE pour les institutions démocratiques et les droits de l’homme (OSCE/BIDDH) ont préparé le présent projet d’avis sur la Loi.

La nouvelle Loi sur l’élection a été adoptée par le Parlement le 23 décembre 2011 et elle est entrée en vigueur le 1er janvier 2012, date à laquelle elle s’est substituée à la Loi de 1989 sur l’élection des membres du Parlement. Cette Loi ne s’appliquera cependant qu’aux futures élections parlementaires, c’est-à-dire celles intervenant après le 1er janvier 2014.

Resume et conclusions

La nouvelle Loi sur les élections adoptée en 2011 vise l’élection des membres du Parlement et sera appliquée dès les prochaines élections législatives prévues pour 2014. Deux lois réglementent les élections des membres du Parlement : la nouvelle Loi sur les élections qui remplace la Loi de 1989 sur les élections des membres du Parlement et la Loi de 1997 sur la procédure électorale (telle qu’elle a été modifiée en 2007 et en 2009), laquelle est toujours en vigueur[1].

La nouvelle Loi sur les élections contient 26 articles. Elle définit le système électoral et énonce des règles de découpage des circonscriptions, y compris deux annexes définissant la délimitation actuelle. La Loi contient également des dispositions relatives à l’éligibilité, à la détermination des résultats du scrutin, aux élections partielles et à diverses autres questions. Avec cette nouvelle Loi sur les élections, le Parlement hongrois est toujours élu sur la base d’un mode de scrutin mixte, mais la formule de répartition des sièges a été modifiée. Le nouveau texte a introduit certains changements importants, dont une réduction sensible du nombre de députés, l’introduction du droit de vote pour les citoyens hongrois résidant à l’étranger et certains aménagements spécifiques visant les minorités nationales.

Parmi les nouveaux éléments introduits par la récente Loi sur les élections, tels qu’ils sont analysés dans le présent avis, il convient de citer ceux qui suivent :

des changements revêtant un caractère neutre sous l’angle des normes internationales :

-          un système à un tour, au lieu du système à deux tours utilisé précédemment pour la répartition des sièges dans le cadre du système de scrutin majoritaire ;

-          une réduction du nombre de sièges au Parlement ;

-          une modification des règles d’enregistrement des candidatures ; et

-          l’élargissement du droit de vote aux citoyens hongrois vivant à l’étranger (c’est-à-dire ne disposant pas d’un domicile fixe en Hongrie).

des changements positifs conformes aux normes internationales et aux bonnes pratiques et susceptibles d’améliorer l’administration des élections :

-          conformément à une demande en ce sens de la Cour constitutionnelle, les circonscriptions électorales sont moins inégales qu’auparavant, puisque dans le régime antérieur les différences violaient certains principes constitutionnels ; et

-          des dispositions spécifiques de la nouvelle Loi sur les élections visent à améliorer la représentation des minorités nationales au Parlement.

Sur la base de ces nouveaux éléments et d’autres dispositions de la nouvelle Loi sur les élections, la Commission de Venise et l’OSCE/BIDDH formulent les recommandations clés suivantes :

-          La délimitation concrète des circonscriptions ne devrait pas figurer dans une loi cardinale requérant une majorité des deux tiers (partie III) ; il conviendrait plutôt qu’une loi de ce type se contente de définir le processus et la formule de délimitation.

-          Tout changement fondamental – affectant notamment le système électoral, la délimitation des circonscriptions électorales et la méthode de répartition des sièges – devrait intervenir après un large débat transparent permettant de prendre en considération divers points de vue politiques. Les vastes consultations de ce type renforcent la confiance du public dans le processus électoral (partie IV).

-          La Loi devrait définir plus clairement la méthode de répartition des sièges entre les circonscriptions (partie IV) et, en particulier, la Loi devrait :

o        définir clairement la méthode de découpage des circonscriptions uninominales composées de comtés administratifs, y compris la ville de Budapest ;

o        définir la variation maximale admissible entre plusieurs circonscriptions électorales à l’intérieur d’un même comté et fixer un plafond de 10 % par rapport à la moyenne des comtés ;

o        établir une commission indépendante – composée par exemple d’un géographe, d’un sociologue et d’une représentation équilibrée des partis et, si nécessaire, de représentants des minorités nationales – chargée de découper les circonscriptions électorales[2] ;

o        prévoir l’examen périodique de la répartition des sièges, au moins une fois tous les 10 ans et, si possible, plus fréquemment, en dehors des périodes électorales sans attendre – comme indiqué dans la Loi sur les élections actuelle – qu’une limite de 20 % soit dépassée[3].

-          Les électeurs ayant le droit de choisir entre une inscription pour un vote sur des listes de partis normales ou sur des listes de minorités nationales lors de chaque scrutin, la loi devrait permettre cet enregistrement dans un délai raisonnablement court avant le jour du scrutin. Une telle mesure permettrait de s’assurer que tous les électeurs disposent d’informations suffisantes pour choisir en connaissance de cause. Toutefois il serait préférable de conférer aux électeurs relevant d’une minorité nationale la possibilité de choisir, le jour du scrutin, entre une liste de minorité et une liste de parti (partie V).

La Commission de Venise et l’OSCE/BIDDH formulent également les recommandations suivantes concernant la Loi sur la procédure électorale qui devrait faire l’objet de modifications supplémentaires :

-          La procédure électorale devrait garantir le principe du vote à bulletin secret conformément à la Loi sur les élections (partie III). En particulier, il conviendrait d’insérer une disposition prévoyant l’obligation d’utiliser systématiquement des isoloirs.

-          La Loi devrait prévoir un délai suffisamment long de collecte de parrainages pour que tous les candidats potentiels puissent prendre part au scrutin (partie V).

-          La Loi devrait définir de manière plus détaillée la procédure de vote depuis l’étranger, notamment sous l’angle du processus d’enregistrement (partie V).

La Commission de Venise et l’OSCE/BIDDH regrettent que de nouvelles dispositions législatives sur les aspects fondamentaux du processus électoral – comme le choix du mode de scrutin et la méthode de répartition des sièges ou le découpage des circonscriptions électorales – n’aient pas fait l’objet d’un vaste débat entre toutes les parties prenantes. Comme indiqué pendant la visite de la commission de Venise et de l’OSCE/BIDDH, les partis composant la majorité parlementaire ont choisi de suivre une procédure de propositions de modification individuelles au lieu d’un projet du gouvernement, ce qui a porté atteinte à la transparence du processus et, par conséquent, érodé la confiance dans le système. La commission de Venise et l’OSCE/BIDDH recommandent que toute future modification (y compris de la Loi sur la procédure électorale qui devrait être prochainement révisée) soit adoptée suite à une vaste consultation visant à atteindre un consensus politique dans le cadre d’un processus ouvert et transparent au sein du parlement.

La Commission de Venise et l’OSCE/BIDDH sont disposés à apporter leur assistance aux autorités dans leurs efforts visant à améliorer le cadre juridique des élections et à rendre celui-ci davantage compatible avec les engagements de l’OSCE et les normes du Conseil de l’Europe. De même, il convient de souligner que les normes internationales ne peuvent être considérées comme respectées que si la loi est intégralement et effectivement appliquée.

Texte de l'avis CDL-AD(2012)012


[1] En vertu de l’article 26(d) de la nouvelle Loi sur les élections, seul l’article 160 de la Loi sur la procédure électorale est abrogé en raison de l’entrée en vigueur de ce nouveau texte de loi, mais les modifications nécessaires devraient être apportées à la seconde loi de manière à rendre les deux textes compatibles.

[2] Voir, à cet égard, le Code de bonne conduite en matière électorale de la Commission de Venise, I. 2.2 vii.

[3] Idem, I. 2.2 v.

Texte de l'avis CDL-AD(2012)002