Commission de Venise - Observatoire des situations d'urgence

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Avis de non-responsabilité: ces informations ont été recueillies par le Secrétariat de la Commission de Venise sur la base des contributions des membres de la Commission de Venise, et complétées par des informations disponibles à partir de diverses sources ouvertes (articles académiques, blogs juridiques, sites Web d'information officiels, etc.) .

Tous les efforts ont été faits pour fournir des informations exactes et à jour. Pour plus de détails, veuillez visiter notre page sur le COVID-19 et les mesures d'urgence prises par les États membres: https://www.venice.coe.int/WebForms/pages/?p=02_EmergencyPowersObservatory&lang=FR


  Belgique

1.     La constitution de votre pays comporte-t-elle des dispositions spécifiques applicables aux situations d'urgence (guerre et/ou autre urgence publique menaçant la vie de la nation)?

L’article 187 de la Constitution belge dispose: « La Constitution ne peut être suspendue en tout ni en partie. » C’est la raison pour laquelle la Constitution ne contient aucune disposition relative à l’état d’exception, traitant des situations d’urgence permettant aux autorités publiques de déroger à la Constitution.
Dès lors, la Constitution n’est suspendue, ni pendant la guerre, ni pendant une autre situation d’urgence publique menaçant la vie de la Nation. De l’expérience des deux guerres mondiales il s’avère toutefois que des dispositions constitutionnelles sont suspendus «en fait », lorsque des circonstances de force majeure ne permettent plus de les appliquer. (p.e. en cas d’impossibilité de réunir le parlement) En outre « l’indépendance du pays » est censée être une valeur supraconstitutionnelle qui justifie des dérogations aux dispositions constitutionnelles dont l’application mettrait cette indépendance en péril. (voir l’arrêté-loi, 11 Octobre 1916, relatif à l’état de guerre et à l’état de siège).
En outre, l’article 105 de la Constitution permet au législateur d’attribuer des pouvoirs au Roi (c’est-à-dire, en pratique, au gouvernement fédéral). Il dispose « Le Roi n'a d'autres pouvoirs que ceux que lui attribuent formellement la Constitution et les lois particulières portées en vertu de la Constitution même. » Sur base de cet article, en cas « de circonstances exceptionnelles ou de circonstances de crise » qui justifient une prise de décision rapide - une crise économique ou financière grave p.e. - le législateur fédéral peut attribuer des « pouvoirs spéciaux » au Roi, lui permettant d’abroger, compléter, modifier ou remplacer des dispositions législatives, par la voie réglementaire, sous condition que les arrêtés royaux que le Roi prend sur base de ces pouvoirs soient par la suite confirmés par une norme législative. La technique des « pouvoirs spéciaux » ne permet toutefois pas au Roi de déroger aux dispositions constitutionnelles, telles que les dispositions du titre de la Constitution belge, garantissant les droits et libertés fondamentales.
Cette même technique dite de « pouvoirs spéciaux, existe aussi au niveau des entités fédérés. (voir e.a. art. 78 Loi spéciale de réformes institutionnelles du 8 août 1980).

2.     Existe-t-il dans votre pays des lois organiques/constitutionnelles ou ordinaires régissant l'état d'urgence ?

En Belgique, il n’existe pas d’acte législatif spécial réglementant l’état d’urgence en général. Pendant la première guerre mondiale l’arrêté-loi du 11 octobre 1916 « relatif à l’état de guerre et à l’état de siège » a été édicté. Cet arrêté-loi sera de nouveau en vigueur en cas d’une éventuelle nouvelle guerre.
Sur base de l’article 105 de la Constitution (voir 1), des lois du 27 mars 2020 habilitant le Roi à prendre des mesures de lutte contre la propagation du Coronavirus Covid-19 (I) et (II), ont conféré des pouvoirs spéciaux au Roi pour une durée de trois mois, dans l’objectif de lui permettre de prendre rapidement les mesures qui s’imposent dans le cadre de l’épidémie ou de la pandémie de coronavirus et d’en gérer les conséquences. (Mon. B. 2° édit., 30 mars 2020)
Les parlements de la Région Wallonne, de la Communauté française, de la Communauté germanophone et, à Bruxelles, de la Région de Bruxelles-Capitale, de la Communauté communautaire commune et de la Communauté communautaire française, ont également octroyé des pouvoirs spéciaux à leurs gouvernements. La Communauté flamande n’a pas adopté un tel décret, mais s’est limitée à voter le décret du 20 mars 2020 contenant des mesures en cas d’urgence civile en matière de santé. (Mon. b., 24 mars 2020)

3. Existe-t-il dans votre pays des lois organiques/constitutionnelles ou ordinaires sur les risques sanitaires ou autres situations d'urgence?

Plusieurs lois ordinaires sont relatives aux risques sanitaires ou autres situation d’urgence.
Pour prendre des mesures de lutte contre la propagation du Covid, impliquant des restrictions à la liberté de circulation et à d’autres libertés fondamentales (voir 8), le gouvernement fédéral ne s’est pas basé sur la loi du 27 mars 2020 attribuant des pouvoirs spéciaux au Roi (voir 2), mais sur l’article 4 de la loi du 31 décembre 1963 sur la protection civile (Mon .b. 16 janvier 1964), les articles 11 de la loi du 5 août 1992 sur la fonction de police (Mon. b. 22 décembre 1992), et surtout sur l’article 181 de la loi du 15 mai 2007 relative à la sécurité civile (Mon. B. 31 juillet 2007), qui dispose: « Le ministre ou son délégué peut, en cas de circonstances dangereuses, en vue d'assurer la protection de la population, obliger celle-ci à s'éloigner des lieux ou régions particulièrement exposés, menacés ou sinistrés, et assigner un lieu de séjour provisoire aux personnes visées par cette mesure; il peut, pour le même motif, interdire tout déplacement ou mouvement de la population. Le même pouvoir est reconnu au bourgmestre. »
Sur base de ces dispositions, le ministre de l’Intérieur a édicté l’arrêté ministériel du 23 mars 2020 portant des mesures d’urgence pour limiter la propagation du coronavirus Covid-19 (Mon. b. 2 éd., 23 mars 2020) qui a été abrogé et remplacé par l’arrêté ministériel du 30 juin 2020 portant des mesures d’urgence pour limiter la propagation du coronavirus Covid-19 (Mon. b. 30 juin 2020) qui a son tour a été abrogé et remplacé par l’arrêté ministériel du 18 octobre 2020 portant des mesures d'urgence pour limiter la propagation du coronavirus COVID-19 (Mon. B. 18 octobre 2020)
Ces arrêtés ministériels ont été préparé au sein du Conseil national de sécurité, présidé par le premier ministre fédéral, auquel participaient entre autres les ministres-présidents des gouvernement des entités fédérées. Depuis l’entrée en fonction du nouveau gouvernement belge au mois d’octobre 2020, l’arrête ministériel est préparé au sein du Comité de concertation, qui est composé de six ministres fédéraux et de six ministres des gouvernements des entités fédérés.
Dans ce cadre, il importe de souligner que « la médecine préventive », à l’exception des mesures prophylactiques nationales, relève de la compétence des Communautés. (art. 5, § 1, 8° Loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles) La Communauté Flamande, la Région Wallonne, qui a repris cette compétence de la Communauté Française, la Communauté Germanophone et à Bruxelles, la Commission Communautaire Commune et la Commission communautaire française, ont dès lors adopté des décrets/ordonnances pour lutter contre la propagation des maladies transmissibles, telles que la maladie du Corona.

4. L'état d'urgence a-t-il été déclaré dans votre pays en raison de la pandémie Covid-19 ? Par quelle autorité et pour combien de temps?

L’état d’urgence n’a pas été déclaré. La Constitution ne prévoit pas la possibilité de le faire. La situation a toutefois été considérée comme étant suffisamment grave pour justifier l’octroi de pouvoirs spéciaux au Roi (gouvernement fédérale), sur base de l’article 105 de la Constitution, et a plusieurs gouvernements des entités fédérées, sur base e.a. de l’article 78 de la loi spéciale. (voir Q2)

5. La déclaration pouvait-elle être, et a-t-elle été soumise à l'approbation du Parlement (si elle a été prise par l'exécutif)?

En Belgique, il n'existe pas de dispositions constitutionnelles ou de lois permettant de déclarer un état d'urgence. Ainsi, le Parlement fédéral belge n'a pas été consulté par le gouvernement sur l'introduction de mesures spéciales, telles que les règles de quarantaine, les mesures d'éloignement social, la fermeture d'écoles, de magasins et d'entreprises, la mise en œuvre du télétravail, etc. En revanche, le Parlement a accordé des "pouvoirs spéciaux" au Roi (voir Q"), en l'habilitant (c’est-à-dire dans les faits, le gouvernement fédéral) à prendre toutes les mesures nécessaires pour lutter contre la propagation de la COVID-19.

6. La déclaration pouvait-elle être, et a-t-elle été soumise à un contrôle judiciaire ? A-t-elle été jugée justiciable?

Non applicable, aucune déclaration ayant été faite..

7. Des dérogations aux droits de l'homme sont-elles possibles dans des situations d'urgence en vertu du droit national? Quelles sont les circonstances et les critères requis pour déclencher une exception? Une dérogation a-t-elle été faite en vertu de l'article 15 de la CEDH ou de tout autre instrument international? Le droit national interdit-il la dérogation à certains droits, même en situation d’urgence? Existe-t-il une exigence explicite selon laquelle les dérogations doivent être proportionnées, c'est-à-dire strictement limitées, quant à leur durée, leurs circonstances et leur portée, aux exigences de la situation?

La Constitution belge ne prévoit pas la possibilité de déroger aux droits et libertés garanties par son titre II, dans des situations d’urgence, au contraire elle l’interdit explicitement dans son article 187. (voir 1)
Plusieurs dispositions de la Constitution permettent par contre de limiter l’exercice des droits et libertés qu’elles incluent, mais non de les suspendre. Les deux principales conditions de limitation sont le principe de légalité (les limitations doivent être prévues par ou en vertu d’une loi) et l’interdiction de mesures préventives. En combinant la lecture du titre II avec des dispositions analogues des conventions relatives aux droits de l’homme, la Cour constitutionnelle garantit, dans la mesure du possible, une interprétation actuelle et évolutive du titre II de la Constitution, qui intègre dans la Constitution la protection que ces conventions offrent, notamment en confirmant l’exigence que les limitations doivent être proportionnées au but légitime qu’elle poursuivent.
La Belgique n’a pas fait de déclaration en vertu de l’article 15 de la CEDH.

8. Quels droits de l'homme ont été limités/dérogés dans votre pays, dans le contexte de la pandémie Covid-19?

Les arrêtés ministériels mentionnés dans la réponse à la question 3, contiennent des limitations aux droits et libertés suivantes :
-la liberté de circulation (interdiction de circulation, imposition d’heures de circulation, limitation aux déplacements dits « essentiels »; couvre-feu; restrictions sur les voyages à destination/en provenance de la Belgique)
-la liberté de réunion (interdiction de rassemblement de plusieurs personnes et des activités sportives et culturelles tant publiques que privées, et/ou limitation du nombre de participants)
-la liberté de religion (interdiction de services religieux et/ou limitation du nombre de participants)
-la liberté d’exercer une activité économique (fermeture de diverses entreprises «non essentielles », notamment le secteur de l’horéca et du commerce)
-le droit de propriété (interdiction d’aller à sa seconde résidence; fermeture d’entreprises)
-le droit à l’éducation (suspension (partielle) des activités scolaires avec présence physique, fermeture temporaire des écoles, universités et jardins d’enfants)
-le droit au respect de la vie privée et familiale (l’obligation de porter un masque facial dans certaines circonstances, notamment dans les transport publics et dans les magasins et les rues commerciales, mesures de confinement, mesures de quarantaine, limitation des visites aux membres de la famille à domicile ou dans les maisons de retraite, les hôpitaux et les prisons, limitation du nombre de contacts sociaux)
-le droit aux soins de santé (report de certaines opérations médicales non urgentes)

9. Si l'état d'urgence n'a pas été déclaré, l'exécutif a-t-il bénéficié de pouvoirs supplémentaires en vertu de la législation ordinaire sur les risques sanitaires ou d'une autre urgence publique? A-t-il décidé d'imposer des restrictions exceptionnelles aux droits de l'homme sur la base de ces lois?

Les lois du 27 mars 2020 ont attribué temporairement des pouvoirs spéciaux au Roi (en pratique au gouvernement fédéral) afin de prendre des mesures de lutte contre la propagation du Coronavirus Covid-19. (voir 2) Le Gouvernement n’a toutefois pas basé sur ces lois les mesures impliquant des restrictions aux droits et libertés fondamentaux; il les a basées surtout sur l’article 181 de la loi sur la loi du 15 mai 2007 relative à la sécurité civile (voir 3) Sur base de cette disposition des arrêtés ministérielles ont imposé les restrictions exceptionnelles décrites dans la réponse à la question 8.

10. Est-ce que la possibilité pour l’exécutif de déroger à la répartition normale des pouvoirs en situation d’urgence est limitée quant à sa durée, ses circonstances et sa portée?

Les lois du 27 mars 2020 ont attribué des pouvoirs spéciaux au Roi pour une période de trois mois. Le législateur n’a pas prolongé cette période.
Les mesures énumérées dans le n° 8 ci-devant ont été prises sur base de l’article 181 de la loi du 15 mai 2007. Cette article ne contient pas de limites explicites quant à la durée du pouvoir du ministre « d’interdire tout déplacement ou mouvement de la population », mais lie ce pouvoir à la notion de « circonstances dangereuses », et au but « d’assurer la protection de la population. » (voir 3)

11. Les sessions du Parlement ont-elles été suspendues pendant l’épidémie Covid-19? Si oui, pour combien de temps? Des règles spécifiques sur le fonctionnement du Parlement pendant l'urgence ont-elles été adoptées? Par le parlement ou par l'exécutif?

Les sessions du Parlement n’ont pas été suspendues.
Le Règlement de la Chambre des Représentants a été adapté à la situation dans laquelle une situation grave et exceptionnelle qui menace la santé publique empêche ses membres d’être physiquement présents en séance plénière.
Une procédure spécifique a été élaborée. Elle implique que la Conférence des présidents peut, dans le cas d’une situation grave et exceptionnelle qui menace la santé publique et qui empêche des membres de la Chambre d’être physiquement présents, décider, pour les résolutions urgentes qu’elle désigne, que les membres pourront communiquer leur bulletin de vote par voie électronique. Les membres empêchés seront assimilés aux membres physiquement présents pour le calcul du quorum.
Ces dispositions sont d’application analogue en commission.
En ce qui concerne la discussion, les dispositions du Règlement permettaient déjà qu’une réunion soit tenue au moyen d’une téléconférence ou d’une vidéoconférence. (Doc. Parl., 2019-2020, 1100/001)
Les parlements des entités fédérées ont pris des mesures analogues

12. Les sessions judiciaires de la Cour constitutionnelle ou d'une juridiction équivalente et/ou d'autres tribunaux ont-elles été suspendues pendant l’épidémie Covid-19? Si oui, pour combien de temps ? Des règles spécifiques sur leur fonctionnement pendant l'état d'urgence ont-elles été adoptées ? Par le parlement ou par l'exécutif ?

Les sessions judiciaires des différentes juridictions n’ont pas été suspendues.
Tout au long de la crise du COVID-19, le Collège des cours et tribunaux a veillé à mettre en oeuvre les mesures édictées par le Conseil national de sécurité.
Classé parmi les services cruciaux ou essentiels, la justice a recherché, dans son organisation un juste équilibre entre le respect fondamental de la sécurité sanitaire de ses acteurs (magistrats, membres du personnel, avocats, justiciables et autres intervenants) et la nécessaire continuité du service. de justice. Dès lors de nombreuses affaires ont pu encore être traités et de nombreuses audiences, maintenues :
- les procédures d'urgence ont été traitées (par exemple, les référés) ;
- Les audiences familiales et civiles ont été maintenues dans la mesure du possible ;
- dans les affaires civiles, la procédure écrite a été appliquée dans une large mesure, de sorte que de nombreuses affaires ont pu être prises en délibéré.
- les affaires pénales urgentes ont été traitées, les parties étant représentées par leur avocat. De cette manière, la présence physique dans les salles d'audience a pu être limitée, ainsi que le transfert des détenus, ce qui a permis réduire drastiquement les risques de contamination dans les prisons;
- L'accès aux greffes et leur fonctionnement étaient assurés, des solutions orientées vers les avocats et le justiciable étant recherchées. Le dépôt électronique des requêtes, lettres, conclusions et pièces via eDeposit ou par courrier électronique a été encouragé et facilité;
- La vidéoconférence a été utilisée dans différents types d'audiences, permettant de prendre en délibéré les affaires.
Dans un souci de sécurité, le collège a encouragé le report des audiences d’introduction des affaires civiles, car cela signifiait que de grands groupes de personnes devaient être présents dans des espaces confinés. Tout cela s’est réalisé en concertation avec les barreaux et les huissiers, qui ont également été contraints de réorganiser leurs activités.
Les audiences d’introduction des affaires civiles ont dû être suspendues. L'arriéré qui s'est ainsi inévitablement créé sera résorbé dans les meilleurs délais par les tribunaux et les cours auxquels le Collège a demandé de tenir des audiences supplémentaires, en fonction des besoins et de la disponibilité du personnel, également au cours des mois de juillet et août.

13. La législation sur l'état d'urgence ou sur la situation d'urgence a-t-elle été modifiée ou adoptée pour faire face à la pandémie de Covid-19?

Non applicable (mais le Parlement fédéral belge a adopté deux lois dites de "pouvoirs spéciaux" habilitant le Roi (c’est-à-dire, dans les faits, le gouvernement fédéral) à prendre toutes les mesures nécessaires pour lutter contre la propagation de la COVID-19, sans suivre la procédure législative habituelle).

14. Cette législation supplémentaire a-t-elle fait l'objet d'un contrôle judiciaire?

Non applicable

15. L'état d'urgence a-t-il été prolongé ? Pour combien de temps ? La prolongation a-t-elle été soumise à un contrôle parlementaire ? A-t-elle été soumise à un contrôle judiciaire?

Non applicable

16. Quels sont les recours juridiques disponibles contre les mesures générales et/ou individuelles prises dans le cadre de l'état d'urgence? Quels sont les recours juridiques contre les mesures prises en application de la législation ordinaire sur les crises sanitaires ? Une modification des recours juridiques disponibles a-t-elle été décidée en raison de l'état d'urgence ou provoquée par celui-ci? Des mesures d'urgence ont-elles été invalidées et pour quelles raisons (compétence, procédure, manque de proportionnalité, etc.).

Les projets de loi/décrets/ordonnances attribuant des pouvoirs spéciaux au gouvernements (voir 2) ont été soumis au contrôle préventif du Conseil d’Etat, section législation, qui a confirmé qu’ils étaient en principe conformes à la Constitution. La loi, les décrets et les ordonnances attribuant les pouvoirs spéciaux au gouvernements, auraient pu être soumis au contrôle de constitutionnalité de la Cour Constitutionnelle, mais aucun recours n’a été intenté.
Les projets des arrêtés ministériels basés sur la loi du 15 mai 2007 relative à la sécurité civile n’ont pas été soumis au contrôle préventif du Conseil d’Etat, section législation, le gouvernement estimant que, vu l’urgence, il était impossible d'attendre l'avis du Conseil. Plusieurs dispositions de ces arrêtés, impliquant des restrictions aux droits et libertés fondamentaux, ont par après été soumis au contrôle juridique, d’une part du Conseil d’Etat, section du contentieux administratif qui a le pouvoir de les annuler et de les suspendre, et d’autre part des juridictions judiciaires qui ont le pouvoir de refuser de les appliquer, en cas de non-conformité aux normes supérieurs.
Plusieurs mesures ont été contestées devant le Conseil d’Etat, section du contentieux administratif, dans le cadre d’un référé « en extrême urgence ». Le Conseil d’Etat a rejeté presque tous ces recours, d’une part parce que les conditions pour ordonner la suspension dans le cadre d’une procédure de référé en extrême urgence n’étaient pas réunies, d’autre part parce que le Conseil jugeait que, tenant parfois compte de la marge d’appréciation dont disposent les autorités en la matière, les mesures prises n’étaient pas sans justification raisonnables, ni disproportionnées.
Le fondement juridique de ces arrêtes ministérielles a aussi été contesté. La jurisprudence est divisée. Certaines juridictions (p.e. Trib. Pol. Charleroi, 21 septembre 2020, Mélotte), appuyées par des constitutionalistes, prétendent que la loi du 15 mai 2007 n’a pas attribué des pouvoirs aussi larges au ministre de l’Intérieur et que le principe constitutionnelle de légalité (voir 7) implique qu’il appartient au législateur de déterminer un cadre légal plus stricte sur base duquel le Roi – non un seul ministre – peut prendre les mesures nécessaires limitant l’exercice des droits et libertés fondamentaux. L’Assemblée générale du Conseil d’Etat, section du contentieux administratif, par contre a jugé que la loi du 15 mai 2007 offrait bel et bien un fondement juridique suffisant et conforme au principe de légalité, aux arrêtés ministériels contestés. (Conseil d’Etat, section du contentieux administratif, nr. 238.818, 30 octobre 2020, NV Unami c. Etat belge ; nr. 238.819, 30 octobre, Verhelst et autres c. Etat belge). D’autres juridictions ont statué dans le même sens. (Trib. Pol. Louvain, 20 août 2020 ; Corr. Bruges, 25 juni 2020)

17. Si des élections parlementaires et/ou, le cas échéant, présidentielles étaient prévues pendant l'urgence de Covid-19 : ont-elles eu lieu? Des dispositions particulières ont-elles été prises et, si oui, lesquelles ? A-t-il été nécessaire de modifier la législation électorale? Quel a été le taux de participation? Comment a-t-elle été comparée à celle des élections précédentes? Si elles ont été reportées, quelle était la base constitutionnelle ou légale pour le faire? Qui a pris la décision? Pour combien de temps ont-elles été reportées? Cette décision a-t-elle été soumise à un contrôle parlementaire ou judiciaire ?

Sans objet. Pas d’élections programmées pendant cette période.

18. Mêmes questions que sous 17, mutatis mutandis, en ce qui concerne les élections locales et les référendums.

Sans objet. Pas d’élections programmées pendant cette période.